La Sauge commune

Avec ses longs épis de fleurs bleu violacé dressés au-dessus des herbes, la Sauge commune est une très belle plante des prairies qui attire bon nombre de pollinisateurs dès le mois d'avril. Connue depuis très longtemps pour ses vertus médicinales, elle l'est aussi des botanistes pour la structure très particulière de ses étamines. Elle mérite donc une observation de près pour mieux comprendre ses particularités.

Présentation

La Sauge fait partie de la famille des lamiacées, ses pétales ne sont pas, comme chez la Ficaire, libres, égaux et étalés en étoile. Ils sont, au contraire, soudés entre eux et forment deux lèvres caractéristiques que nous avons déjà vues chez le Romarin. Comme chez celui-ci la corolle est divisée en une lèvre inférieure sur laquelle atterrissent les insectes et une lèvre supérieure dont nous allons dévoiler les secrets.

Fleur de Sauge commune
Fleur de Sauge commune

Une famille parfumée

La famille des lamiacées renferme un nombre très important de plantes aromatiques. Le Thym, la Sarriette, le Romarin et la Menthe en font partie. Ces plantes possèdent également de nombreuses propriétés médicinales et, sans surprise, c'est aussi sur le cas de la sauge.

Remède universel

Si l'on devait établir un classement des plantes qui guérissent, la Sauge serait au sommet du podium. Même son nom latin, Salvia (de "Salvare" = sauver) fait référence à ses pouvoirs. Astringente, antiseptique, anti-inflammatoire, tonique, digestive, stimulante hormonale et antisudorifique sont ses principales propriétés largement utilisées depuis l'antiquité. Vous retrouverez quelques liens concernant ces usages à la fin de l'article.

Pollinisation de la Sauge commune
Pollinisation de la Sauge commune

Distributeur de pollen

Si la sauge est très utile, sa fleur possède également une grande originalité. Lorsqu'une abeille se pose sur la lèvre inférieure et commence à lécher le nectar, deux étamines sortent de la lèvre supérieure et descendent pour toucher le dos de l'insecte ! Comment une fleur peut-elle réagir à la visite d'un insecte en déclenchant le mouvement de ses étamines et la distribution du pollen ? Nous allons découvrir ce secret dans ce qui suit.

Au cœur de la fleur.

Pour mieux comprendre les secrets du mouvement des étamines, observons une fleur de plus près.

Les éléments visibles de l'extérieur (Illustration 2)

Comme cela a été décrit précédemment, la fleur de Sauge possède une corolle à deux lèvres (bilabiée). Celle-ci est composée de 5 pétales inégaux soudés à leur base. Elle s'insère dans un calice, lui aussi, bilabié dont les sépales sont soudés pour former une cloche à 5 lobes dentés (3 au-dessus et 2 au-dessous)

La fleur laisse également dépasser de la lèvre supérieure, le style, qui est l'extrémité du pistil.

Préparation de la fleur, une ouverture délicate. (Illustration 3)

Pour observer l'intérieur de la fleur de sauge, il va falloir de la délicatesse et une bonne loupe binoculaire. L'opération doit débuter par la lèvre supérieure que l'on va fendre en enfonçant une pointe dans son dos puis la déchirer en remontant. Une fois cette première étape réalisée, vous devriez voir l'intérieur de la lèvre supérieure en coupe longitudinale et donc deux étamines courbées surmontées par le style.

La deuxième étape, un peu plus difficile, va consister à découper la partie inférieure de la corolle pour dévoiler la base des étamines sans la détacher. Au passage, vous allez également découper la moitié du calice.

Structure et mécanisme des étamines (Illustration 4)
Mécanisme de pollinisation de la Sauge commune
Mécanisme de pollinisation
de la Sauge commune

Si vous avez réussi l'opération précédente, vous avez sans doute déjà compris le fonctionnement des étamines et percé le secret de leur mouvement. Vous remarquerez que chaque étamine est fixée à la corolle par un court filet. Mais, là où habituellement ce dernier se termine par deux sacs polliniques, on découvre sa forme en arc avec, d'un côté, un seul sac pollinique et de l'autre une forme aplatie et élargie s'associant à la deuxième étamine. En fait, c'est comme si les deux sacs polliniques s'étaient séparés et que l'un d’eux était devenu stérile en s'élargissant. Le filet de l'étamine soutient donc, à son extrémité, un sac pollinique et de l'autre, une forme particulière résultant de la transformation de la seconde loge devenue stérile. Là où cela devient ingénieux, c'est qu'en allant chercher le nectar, l'abeille pousse avec sa tête la partie stérile unissant les étamines et fait redescendre l'arc portant le sac pollinique sur le dos de l'insecte. La Sauge a donc des étamines à bascule qui saupoudrent de pollen le dos des insectes qui viennent visiter la fleur. Ce mécanisme peut être actionné en poussant avec une petite tige dans le creux de la lèvre inférieure. On voit alors descendre les étamines.

Un pistil presque sans mystère (Illustration 5).

Pour terminer la visite de la fleur, attardons-nous sur le pistil. Celui-ci débute dans le creux du calice par 4 parties assemblées en un ovaire supère au centre duquel démarre le style. Ce dernier passe par le cylindre de la corolle, puis suit la courbure de la lèvre supérieure de la corolle pour en ressortir longuement en se divisant à son extrémité en deux stigmates. Ce sont ces derniers qui, en touchant le dos du nouvel arrivant dans la fleur, vont récolter du pollen déposé à l'insu du visiteur lors d'une précédente visite chez une fleur voisine. Enfin, vous remarquerez également que l'ovaire est posé sur un disque nectarifère orange, la fabrique de nectar. Sur ce dernier point, le pistil est assez semblable à celui de la bourrache décrite dans un précédent article et bien sûr semblable au Romarin.

En bref

La fleur de Sauge commune est composée de :

  • 5 sépales soudés entre eux formant une lèvre supérieure à 3 dents et une lèvre inférieure à 2 dents
  • 5 pétales soudés entre eux à la base formant une lèvre supérieure et une lèvre inférieure
  • 2 étamines fixées sur les côtés de la corolle équipée et assemblées entre elles pour former un mécanisme à bascule.
  • Un pistil avec un style gynobasique terminé par deux stigmates et un ovaire à 4 loges.
E. PENSA