Lavande des Maures
Lavande des Maures

Le sud de la France est en grande partie constitué de roches calcaires qui donnent aux paysages des touches de clarté à l'image de la célèbre falaise de Sainte Victoire. Cependant, les terrains non calcaires sont loin d'être négligeables, car ils peuvent former des massifs entiers offrant des paysages originaux.

De l'ouest à l'est de la zone continentale méditerranée on trouve les grands massifs siliceux en Albères puis du Cap Sicié à l'ouest de Toulon à l'Estérel, en passant par le massif des Maures et celui du Tanneron.

Écorce de chêne liège
Écorce de Chêne-liège

Les roches qui les composent, beaucoup plus anciennes que les calcaires, sont les restes d'une terre disparue, le continent pyrénéo-corso-sarde qui, bien avant le temps des dinosaures, constituait l'essentiel du paysage "méditerranéen" à l'emplacement actuel de la mer avec un océan au nord. Dans ces massifs les roches sont des schistes, micaschistes, quartzites, gneiss et porphyres pour l'essentiel, ces roches sont riches en silice d'où le terme terrain siliceux.

Quelles différences pour les plantes ?

La principale différence entre une roche calcaire et siliceuse pour une plante est que le calcaire libère beaucoup de calcium contrairement à la roche siliceuse. La teneur en silice ne joue aucun rôle. Par conséquent, nous aurons schématiquement deux catégories de plantes : celles qui ne supportent pas du tout le calcaire et celles qui s'en accommodent. Les premières sont dites calcifuges (qui fuient le calcaire) et vont rester sur les terrains non calcaires. Les secondes pourront se trouver à la fois sur les terrains calcaires ou siliceux. Les autres différences seront au niveau de l'acidité du sol (un sol siliceux est plus acide qu'un sol calcaire) et au niveau de la température (les terrains calcaires sont plus chauds)

En résumé, une plante a le choix entre un terrain siliceux pauvre en calcium, plus acide et plus frais ou un terrain calcaire très riche en calcium, moins acide et plus chaud. C'est en fonction de tous ces critères qu'elle pourra ou non coloniser un des deux milieux.

Allure caractéristique des pins parasols
Allure caractéristique
des pins parasols

La végétation des terrains siliceux

Sur les terrains siliceux, les résineux dominants sont le pin maritime ou pin mésogéen et le pin parasol ou pin pignon. Le premier fuit réellement le calcaire tandis que le second apprécie les terrains sablonneux qu'il trouve plus facilement dans les massifs siliceux. Les feuillus principaux sont : le chêne-liège, le châtaignier, le chêne vert et le chêne blanc. Ici encore, seuls les deux premiers fuient le calcaire et forment des suveraies (forêt de chêne-liège) ou des châtaigneraies absentes sur calcaires.
Comme sur calcaire, ces forêts sont dégradées en formation basse riche en buissons. Sur silice, le maquis avec ses bruyères et myrtes est l'équivalent de la garrigue riche en chêne kermès ou en romarin. Le maquis est plus dense que la garrigue.

À la rencontre des plantes les plus fréquentes

Une petite balade dans les massifs siliceux vous permettra de rencontrer un ensemble de plantes fuyant le calcaire ou non. Voici quelques-unes de ces plantes trouvées en automne en me rendant dans le massif des Maures et dans l'Esterel.

Les 3 chênes

Les chênes sont des feuillus portant des glands à la fin de l'été et les perdant à l'automne. Le Chêne blanc ou Chêne pubescent (Quercus pubescens) se reconnait facilement à ses feuilles ovales au bord découpé en lobes arrondis qui brunissent puis tombent en hiver. Chêne vert (Quercus ilex) et Chêne-liège (Quercus suber) ont, au contraire, un feuillage persistant et leurs feuilles sont, pour les deux espèces, ovales entières ou, plus ou moins, dentées ou même piquantes. Le dessus de la feuille est vert foncé et le dessous couvert de poils grisâtres. En fait, le critère de distinction le plus simple est l'écorce en liège pour le chêne-liège et une écorce classique pour le chêne vert.


Les 3 pins
Écorce incendiée d'un Pin parasol
Écorce incendiée
d'un Pin parasol

Pour les pins, c'est encore plus facile, le Pin pignon ou Pin parasol (Pinus pinea) se distingue des deux autres par son allure en parasol au feuillage dense. Ses aiguilles, accrochées par deux, sont épaisses (plus de 1 mm) et ses cônes sont gros, lourds et presque sphériques. Les graines du pin pignon sont de grande taille. Elles n'ont pas d'aile et leur enveloppe coriace libère un pignon comestible lorsqu'on la brise.

Les deux pins suivants n'ont pas cette allure en parasol dense, le Pin maritime (Pinus maritima) ou Pin mésogéen à des aiguilles épaisses (plus de 1mm) et allongées et ses cônes ont des écailles portant des pointes (écusson). Enfin, le Pin d'Alep (Pinus halepensis) très répandu sur les terrains calcaires a les aiguilles les plus fines (moins de 1 mm) et les plus courtes . Ses cônes, plus petits que ceux du Pin maritime, n'ont pas d'écussons pointus. Pin d'Alep et Pin maritime ont tous deux des graines ailées.

Pin maritime et Pin d'Alep
Pin maritime et Pin d'Alep

Principaux arbustes et buissons

Comme pour les arbres, on trouvera sur les terrains siliceux à la fois des arbustes et buissons absents du calcaire et qui domineront d'autres végétaux présents sur les deux milieux. Les deux buissons les plus typiques des terrains siliceux sont les bruyères et le Myrte. L'Arbousier (Arbutus unedo) est un arbuste très fréquent sur silice, il se reconnait à des feuilles ovales lancéolées dentées coriaces, à ses fleurs blanchâtres en clochette et à ses fruits, les arbouses , comestibles, à la peau granuleuse qui murissent en même temps que la floraison suivante.

Callune
Callune
Bruyère
Bruyère
Bruyère ou callune ?

Voici deux plantes qui se ressemblent par leurs feuilles très fines et leurs fleurs en forme de clochettes rosées. On peut néanmoins facilement les séparer par au moins trois caractères.

La Callune (Calluna vulgaris) est un buisson bas qui fleurit à l'automne. Ses feuilles sont très courtes, imbriquées sur 4 rangs . La fleur de callune à 8 divisions colorées ( dont 4 sépales colorés comme la corolle qui couvrent les pétales)

Les bruyères (Erica) sont des buissons hauts qui fleurissent au printemps, sauf pour la Bruyère multiflore (Erica multiflora) qui pousse sur calcaire. Leurs feuilles sont fines et longues de quelques millimètres jusqu'à atteindre le centimètre. Elles sont disposées en verticilles de 3-5 sur les tiges. Les fleurs ont 4 lobes formés par les 4 pétales soudés en cloche (les sépales sont beaucoup plus courts)

Les trois bruyères

La distinction étant faite entre bruyère et Callune voici maintenant comment distinguer les trois principales espèces de bruyères. Ce sont les fleurs ou les restes de fleurs qui permettront de faire assez facilement la distinction. La Bruyère arbustive (Erica arborea) à des fleurs rosées en forme de clochettes très nombreuses. La corolle à 4 lobes peu profonds cache les étamines. Après la floraison et la fructification, les clochettes tombent rapidement. La Bruyère à balais (Erica scoparia) possède des fleurs très petites en forme de grelot à 4 lobes profonds. Enfin, la Bruyère multiflore (Erica multiflora) porte des fleurs de la taille de la bruyère arbustive, mais leurs étamines dépassent longuement de la corolle. Ces fleurs forment une grappe dense qui persiste assez longtemps après la floraison. Le dernier critère de distinction, la floraison, a lieu en automne pour la bruyère multiflore et aux printemps pour les deux autres. En l'absence de fleurs la Bruyère arbustive se distingue par la présence d'un duvet blanc sur les tiges contrairement à la bruyère à balais.

Les quatre cistes

Les cistes, buissons aux grandes fleurs à cinq pétales froissés et aux nombreuses étamines, sont très présents dans les maquis. Le Ciste blanc, déjà répandu dans les garrigues, est moins présent dans ces milieux, concurrencés par 3 autres espèces de sa famille. Le point commun de toutes ces espèces est d'avoir des feuilles opposées assez épaisses. Voici comment les distinguer entre elles.

  • (1) Le Ciste de Montpellier (Cistus monspessulanum) a des fleurs blanches aux pétales lobés. Ses feuilles sont allongées, épaisses, aromatiques et collantes au sommet des tiges.
  • (2) Le Ciste à feuilles de sauge(Cistus salviifolius) se reconnait à ses feuilles ovales épaisses à pétiole net et à ses fleurs blanches.
  • (3) Le Ciste ladanifère(Cistus ladanifer) possède de grandes fleurs blanches aux pétales décorés d'une tache foncée. Les feuilles sont très aromatiques et collantes (ladanum).
  • (4) Le Ciste blanc (Cistus albidus) se distingue par ses feuilles vert clair, très douces au toucher et ses fleurs roses.
Ciste de Montpellier
Ciste de Montpellier
Ciste à feuilles de Sauge
Ciste à feuilles de Sauge
leCiste ladanifèregende3
Ciste ladanifère
Ciste blanc
Ciste blanc
Et les autres...

D'autres buissons vivent sur sol siliceux, le Calicotome épineux(Calicotome spinosa), le Cytise à feuilles sessiles (Cytisophyllum sessilifolium), les Filaires et la Lavande des Maures se trouvent aussi facilement en compagnie de la Badasse, le Romarin et l'Immortelle.

Nous arrêterons là cette liste à laquelle peuvent se rajouter de nombreuses espèces rares. À vous de découvrir les autres, bonne balade.

E. PENSA