Une fleur sous la loupe : l'Ophrys

Dès le mois de mars, vous passez à côté d'elles sans même les remarquer et pourtant elles sont loin d'être cachées, bord de routes, parking, GR, les Ophrys sont bien là. Vous l'avez compris, l'Ophrys est une orchidée difficile à voir, car elle est loin de ressembler à une fleur. En fait, c'est lorsqu'on en a vu une que l'on s'aperçoit qu'il y en a d'autres tout autour.

Portrait-robot d'une Ophrys

À première vue, une Ophrys est formée d'une rosette de feuilles au ras du sol d'où se dresse une tige portant des éléments marrons, verts ou roses, ayant, de loin, plus l'allure d'un insecte qu'à une fleur. Dans le sol, la plante possède un tubercule qui lui permet de passer l'été en vie ralentie.

Lorsqu'on regarde une fleur, on s'attend à voir au moins des pétales, des étamines et un pistil et bien chez les Ophrys il est bien difficile de s'y retrouver. Les pétales sont souvent fins et assez discrets, les sépales étant souvent les seuls à avoir des couleurs vives. Les étamines sont cachées tout comme le pistil !

En fait, la fleur d'Ophrys possède les particularités suivantes :

  • 3 sépales dont la couleur est souvent plus vive que les pétales
  • 3 pétales, dont 2 de taille réduite par rapport aux sépales, souvent peu colorés. Enfin, un dernier grand pétale est dirigé vers l'avant, c'est le labelle, complètement différent des 5 pièces précédentes. C'est ce dernier qui a l'allure d'un insecte vu de loin.
  • Pour les étamines, c'est plus compliqué, car elles sont réellement cachées à l'intérieur de deux petites loges séparées. Particularité des orchidées, la base de l'étamine, nommée bursicule, est collante. En touchant cette zone, un insecte va involontairement extraire l'étamine de sa loge et l'emporter avec lui. Ces étamines spéciales sont appelées pollinies.

Et le pistil ?
C'est encore plus compliqué pour le pistil qui est, en quelque sorte, incorporé à la fleur sans former une structure indépendante. L'ovaire est infère (sous la fleur) et l'extrémité qui doit recevoir le pollen est réduite à un petit renfoncement sous les loges des étamines, la cavité stigmatique. Cette fusion entre les parties mâles et femelles de la fleur, porte de nom de gynostème.

Comment fonctionne la fleur d'Ophrys ?

Pollinie
Pollinie

Là où la fleur d'Ophrys va beaucoup plus loin que les autres, c'est avec son labelle. Par sa forme, sa pilosité et ses couleurs, il va être pris pour un insecte par les insectes eux-mêmes. Suivant les espèces d'orchidées, c'est la tête la première ou à l'envers que les mâles de certaines abeilles viendront s'accoupler avec ce qu'ils prennent alors pour une femelle. Au cours de cette manœuvre, l'insecte en touchant les bursicules va se coller une ou deux étamines qui pourront libérer leur pollen dans la cavité stigmatique d'une autre fleur à la prochaine pseudocopulation.

Pseudo copulation entre une abeille sauvage et un Ophrys
Pseudo copulation entre une abeille sauvage et un Ophrys

Voici, ci-dessus, un exemple de pseudocopulation entre une abeille mâle et l'ophrys brun. L'abeille se pose sur le labelle en croyant qu'il s'agit d'une femelle et s'y accouple. Son abdomen au cours de ses mouvements, finit par toucher une bursicule et se colle alors une étamine (pollinie). En allant dans une autre fleur, le pollen ainsi transporté atterrit dans la cavité stigmatique et la fleur est fécondée.

E. PENSA